Le cosmos: plusieurs États accroissent leur présence, seul Washington parle de guerre du futur

Dans un été dominé par des sujets classiques — Israël, Gaza, les Druzes, Trump sous la pression du procureur, l’affaire Benalla, contestation au Venezuela –, le cosmos grouille d’activités humaines et aussi politiques. L’intensité de ces activités ne laisse plus la place au doute: l’espace est un chantier où ne jouent que les grands.

LES ÉTATS-UNIS D’ABORD: LUNE, MARS, LE SOLEIL, ET MÊME UN TAXI

La Parker Solar Probe de la NASA, c’est-à-dire la sonde dirigée vers le soleil par l’agence spatiale américaine, a décollé ce 11 août. La sonde ira plus près qu’aucune sonde préalable, et étudiera le phénomène du “vent solaire” théorisé par un scientifique américain nommé Eugene Parker en 1958. Il s’agit des particules qui émanent du soleil et qui circulent dans le cosmos qui n’est donc pas véritablement un vide sidéral.

Une hypothèse lourde de conséquences pour la terre: l’effet de certaines explosions sur la surface du soleil serait de générer un vent solaire exceptionnel et nocif pour les courants électriques terrestres, comme cela se serait produit en 1859, provoquant le détraquage du tout jeune réseau télégraphique.

Le gouvernement des États-Unis s’intéresse aussi à des chantiers plus immédiats: la NASA annonce la livraison des nouvelles capsules spatiales américaines pour faire la navette terre-ISS: le Crew Dragon de la société SpaceX, et le CST-100 Starliner de Boeing. Bientôt les Américains — et les Européens par la même occasion — n’auront plus besoin d’effectuer les liaisons vers l’ISS (International Space Station) par les spationefs Soyuz, russes. Les Soyuz ont bien servi depuis le retrait des Space Shuttle (navettes spatiales, retirées de service en 2011), mais ils vivent leurs derniers mois comme unique taxi de l’espace. Les nouveaux taxis ne devraient-ils pas être peints en jaune comme les taxis new-yorkais?

La Starliner, l’un des deux nouveaux taxis entre la Terre et l’ISS

L’AVENTURE SPATIALE INSPIRE PEU DE DOCTRINE, MAIS BEAUCOUP D’EFFORTS
Le cosmos ne cesse de stimuler les efforts des grandes puissances, qui agissent sans même que la pression populaire ne les y oblige. Le Japon, la France, l’Allemagne, l’Italie, Israël, la Chine, la Russie, et bien sûr les États-unis sont les principaux des États qui lorgnent vers l’espace tout en étant capables de mener une mission partiellement autonome avec l’appui de partenaires secondaires. Des choix s’offrent à leurs gouvernants, et à leurs peuples aussi: faut-il demeurer dans la coopération scientifique? rester purement pacifique? impulser la découverte de Mars? revenir sur la Lune? à quoi sert l’exploration spatiale? combien financer tout cela s’il n’y a pas de retombées économiques ?

Ce sont les doctrines spatiales de chaque État qui devraient nous fournir la réponse. Paradoxalement, ces doctrines font l’objet de bien peu d’explications, et le public reste distant, à la différence de la période des Apollo. Les pouvoirs publics et parapublics agissent sans vraiment compter sur un engouement populaire. Tant qu’il y a le budget, l’activité continue, et l’État profond sait que le cosmos ne peut être délaissé, sous peine de déclassement national. Pour le dire autrement : les grands commis de l’État savent qu’il faut aller dans l’espace, et sont sûrs qu’une fois les voyages et les installations seront faisables les avantages et retombées se manifesteront d’elles-mêmes. Allons voir ce qu’il y a sur la Lune, Mars, le Soleil, les satellites et les astéroïdes, et nous en tirerons bien quelque avantage — voilà la doctrine de ce jour. Curieusement, c’est le duo Donald Trump et Mike Pence qui parlent le plus d’espace sur la scène mondiale. Leur doctrine: être les meilleurs, aller partout et tout explorer. Non sans penser à la guerre de demain, comme nous verrons plus bas.

LA CHINE POPULAIRE LORGNE LA LUNE
Un aspect longtemps considéré comme démodé est le retour sur la Lune, pour la aprcourir voire la coloniser. L’agence spatiale chinoise, marchant à contre-courant, vient de compléter une mission de présence sur la Lune — et presque tout le monde l’a oublié! Il s’agit de la mission Change’3 d’alunissage et d’exploration par voiture électrique télécommandée — génériquement une “rover”. La fusée Longue Marche fut tirée le 1er décembre 2013 avec à son bord le rover, le 14 décembre l’alunissage réussit, et le rover nommé Yutu (Lapin de Jade, personnage mythologique chinois) se mit à parcourir la surface lunaire. Au bout de deux jours Yutu s’immobilisa à cause d’une anomalie mais continua de transmettre des images et des données pendant 31 mois, au lieu des 3 mois initialement prévus! Des missions nouvelles, Change’4 et Change’5 sont prévus pour les toutes prochaines années, et l’on verra une capsule chinoise alunir sur le dos de Yutu puis regagner la planète Terre, et dans 15-20 ans ces capsules transporteront des taïkonautes. Le prochain homme sur la Lune sera probablement chinois. La prochaine colonie aussi.

无命题14 : le module de la mission chinoise telle qu’elle est sur le lune

À quoi pourrait servir une présence humaine sur la Lune? À observer les astres sans l’encombrement visuel provoqué par l’atmosphère polluée; à surveiller la Terre par téléscope; à trouver des minerais rares; à constituer un relais à l’ISS; à se prêter à tout usage militaire dont celui de permettre la destruction par laser des satellites adverses… Les raisons d’explorer et de coloniser l’espace sont éparses, mais réelles.

LES AUTRES MISSIONS LUNAIRES:
Cet été l’agence spatiale israélienne a annoncé fin juillet qu’une mission israélienne posera un module sur la Lune. Une fusée décollerait en février 2019, avec un rover à son bord, capable de parcourir 500 mètres et de transmettre des images vidéo de haute définition.

La République de l’Inde lancera un orbiteur et un rover lunaire inhabité, théoriquement en 2018. Chandrayaan-2, le nom du rpojet, devait à l’origine être un projet indo-russe, mais il y eut trop de problèmes du côté de Roscosmos, l’agence nationale russe.

LES MISSIONS ASTÉROÏDES
Il convient de faire mention des autres nationalités actives dans l’espace: une mission japonaise, Hayabusa2, a déjà posé un module sur un astéroïde, Ryugu, à 280 millions de km de la Terre, en juin 2018. Ce module provoquera une explosion, prélèvera des échantillons, et les remportera sur la Terre en 2020! Encore une prouesse.
Un programme similiaire est en cours, piloté par la NASA, Osiris-Rex, sur un autre astéroïde.

LES MISSIONS MARTIENNES
La planète rouge reste la prochaine destination de l’humanité. Le président Obama l’avait voulu, mais en oubliant la lune. Le président Trump a annoncé fin 2017 que les États-Unis devaient remettre le cap sur la Lune ainsi que sur Mars!

Une mission martienne européenne, et plus particulièrement italienne, est passée par dessus Mars, et a détecté la probable existence de lacs d’eau souterrains! La technologie de géoexploration par ondes est des plus avancées.

LA MILITARISATION
Washington, Pékin, Moscou y pensent.
En mars 2018 le président états-unien précise que se sont les autres puissances qui ont transformé l’espace en “domaine de combat” (warfighting domain) et le vice-président Mike Pence a annoncé en août l’établissement de trois axes: un commandement supplémentaire pour les forces armées appelé Space Command, une agence de développement spatial, au bout la création de l’embryon d’une branche séparée des forces armées appelée Space Force (ce qui déplaît à la US Air Force qui perdrait son contrôle sur l’espace).

Il n’est pas faux de dire que la Russie et la Chine préparent la militarisation de l’espace. Les dirigeants américains n’ont pas négligé le domaine non plus, mais aujourd’hui ils jouent à dire “c’est vous qui avez commencé”. Il est évident que la concurrnce à raison de milliards de dollars n’est pas un jeu spontané poir naïfs.

CONCLUSION:
Dans le domaine civil, les coopérations sont nombreuses, même entre Russes, Chinois, Japonais, Européens, et bientôt Israéliens et Indiens. Entre Européens la coopération est forte, au sein de l’Agence spatiale européenne, et aussi via un certain protagonisme de l’UE. Les satellites lancés autour de Mars ne sont plus rares, et la planète rouge ne présente pas encore d’intérêt militaire.
Toujours est-il qu’en cette année 2018, les missions spatiales vont bon train, se multipliant sans cesse, et la composante purement militaire n’a pas encore pris le dessus. L’exploration scientifique de l’espace offre une vision d’avenir pour l’humanité, ce qui est en soi un bénéfice commun. L’argument économique n’a pas beaucoup de sens dans l’âge technologique. Si seulement les gouvernants et politiciens pouvaient s’en enorgueillir plus souvent. Donald Trump aura été le dirigeant à faire le plus d’annonces grandioses sur le sujet, bien qu’il a largement éclipsé la gloire qu’il aurait pu en tirer aux États-unis par son déluge de Tweets et déclarations politiciennes sur des sujets bien moins nobles.

Les Témoignages du Troisième Reich en plein été

L’on a souvent des surprises à Woodstock, New York, et bien loin de l’image d’Épinal des hippies et rockers d’autrefois. À la librairie du village, une présentation de livre, de Gabriel Motola, écrivain américain juif mais totalement laïc. Dans la librairie Golden Notebook il y avait au moins 40 personnes, presque tous d’âges mûrs voire très avancés, et plusieurs rescapés du Troisième Reich, dont même une Française fille de rescapée, et un autre auteur dans la salle, Norman Manea, il a sa fiche Wikipedia.

Gabriel Motola, critique littéraire, se penche sur la question de l’Holocauste. Woodstock, août 2018

Dans son livre They Bore Witness Motola a analysé, voir interviewé pour le cas des vivants, les œuvres littéraires de rescapés eux-mêmes devenus commentateurs de leur calvaire. Primo Levi (dont je viens de lire Se questo è un uomo), et Norma Manea donc, survivant roumain et romancier et littérateur installé aux États-Unis depuis son entrée en dissidence en Roumanie dans la décennie finissante du communisme, entre autres. “L’antisémitisme renaît un peu partout, et demeure presque impossible à expliquer. C’est comme une constante de la civilisation occidentale”, a-t-il dit.

Après les témoignages de l’assistance — une vraie affaire de témoins de l’Holocauste ou d’enfants de survivants– nous avons eu droit à la tirade anti-Trump issu du public. Motola a rejeté l’idée que Trump était le nouvel Hitler, “non, je ne le vois pas œuvrer à la liquidation physique de groupes ethniques entiers”, et quelqu’un d’ajouter “pas encore”. Ambiance de l’Amérique de gauche libérale.

Tout le monde s’est malheureusement dispersé en un clin d’œil, je n’ai pas pu continuer de discuter, même pas avec le juif néerlandais qui a été caché aux Pays-Bas par une famille indonésienne, mais dont les frères et sœurs dans d’autres familles ont été raflés, sa mère non, son père ayant péri à Auschwitz. Les gens ne restent pas pour converser, un autre problème occidental.

Curiosité personnelle: pourquoi des Indonésiens seraient-ils épargnés par les Nazis? Le monsieur néerlandais sauvé par eux ne savait pas très bien, mais j’ai mon idée: les Indonésiens étaient quasiment devenus des sujets de l’Empire japonais qui avait envahi les Indes Orientales Néerlandaises. Les indigènes avaient été remontés contre les Néerlandais. Je m’imagine que les alliés, même approximatifs, du Troisième Reich, ont été épargnés sur les territoires conquis. Les guerres sont toujours pleines de détails particuliers, sur des cas isolés, car seuls les cas isolés ont survécu à ce qui devait être leur mort. Primo Levi a survécu à Auschwitz car chimiste il a été affecté à l’usine de caoutchouc synthétique (buna), ce qui l’a sauvé, comme l’a justement rappelé Gabriel Motola.
HH

Un mois d’actualités en Israël : le changement tellurique

Cette fin de juillet 2018 en Israël : changements telluriques

180 intellectuels ont signé contre la loi sur la nationalité, encore appelée loi sur l’État-nation, qui sont-ils? Ils ont également signé contre la loi sur sur la gestation par autrui — dite Loi sur la Suprématie — qui exclut les couples homosexuels masculins de la GPA mais la permet pour les lesbiennes. Le cinéaste Amos Oz fait partie des signataires. On verra plus tard ce que représentent ces signataires.

800 personnes à Tel Aviv suivent leçon publique d’ arabe, la plus grande au monde, pour protester contre la loi sur l’État-nation.

Les prisonniers “sécuritaires” palestiniens gaspillent de l’eau délibérément, les autorités israéliennes parlent d’une forme de terrorisme 30 juillet 2018

La révolte druze (voir le drapeau des Druzes, toujours arboré en Israël à côté du drapeau israélien) , Naftali Bennet est avec les Druzes, et regrette certains aspects de cette loi tant désirée par lui, sans pour autant être avec les bédouins ou les musulmans en général. Les Druzes: avec cette loi nous devenons mercenaires, disent plusieurs militaires druzes, dont des officiers, qui viennent de démissionner dans un fracas national.

La énième querelle entre orthodoxes hégémoniques et laïcs: l’accès à la piscine. Des femmes soldates dans une brigade spéciale ont plongé dans la piscine fournie par Tsahal, pour être éjectées par les ultra-orthodoxes. Certains groupes orthodoxes veulent une baignade ségréguée par sexe et par horaire, d’autres non, plusieurs orthodoxes qui se baignaient avec les femmes ont quitté la piscine par solidarité civique. La hiérarchie militaire louvoie, trop contente d’enfin avoir des orthodoxes sous le drapeau, eux qui traditionnellement se trouvent des exemptions à la conscription.

Benjamin Netanyahu est-il un vrai historien ? Comment peut-il dire aux Druzes qu’ils auront privilèges et statut spécial sans que la loi soit changée? L’appartenance des Druzes à la nation israélienne remonte aux origines, et la loi est unanimement décriée chez ces mêmes Druzes. Et comment Benjamin Netanyahu peut-il s’accommoder si facilement de la loi polonaise interdisant la mention “Camps de concentration polonais” (voir lettre ouverte entre Netanyahu et son homologue polonais Mateusz Morawiecki)?

 

Jason Greenblatt, le négociateur mandaté par Trump pour le dossier israélo-palestinien: que négocie-t-il? De temps à autre l’on entend son nom.

(drapeau du Hamas)

Dans le dossier des cerfs-volants incendiaires, 1200 incendies sur le territoire israélien pur (c’est-à-dire des frontières 1949-1967), le gouvernement israélien émet plusieurs menaces contre Hamas, et y ajoute l’incitation aux Gazaouis de se révolter contre Hamas. Or, il me semble que si des Gazaouis que j’ai pu rencontrer n’approuvent pas du Hamas, ils n’ont pas pour autant envie de suivre les recommandations israéliennes.

Le programme spatial israélien –mais qu’est-ce que c’est ? Pourquoi Nasa puis Google lâchent le projet de poser une capsule sur la lune, capable de franchir 500 mètres et transmettre des vidéos de haute définition?

LGBT: gay pride, Jérusalem, drapeaux arc-en-ciel 🌈 trop nombreux près de synagogues, chacun garde le souvenir d’un participant de gay pride assassiné par un ultra-oethodoxe il y a deux ans.
HH

Les gouvernements persécutent les défenseurs des droits de l’homme, ou comment être d’accord avec Zeid Ra’ad Al Hussein, Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme.

Je cite sa lettre ouverte du 11 septembre 2017, qui ovre la session des droits de l’homme :

http://www.ohchr.org/FR/NewsEvents/Pages/Media.aspx?IsMediaPageFR=true&LangID=F

“The actions of violent extremists cannot totally obliterate our world. Only governments can do that – and this is the greater tragedy of today. Left on their current course, it will be governments who will break humanity. Terrorists may attack us, but the intellectual authors of those crimes will then often sit back and watch as governments peel away at human rights protections; watch, as our societies gradually unravel, with many setting course toward authoritarianism and oppression…

does it not occur to the many Governments who engage in intimidation and bullying, and commit reprisals against human rights defenders and NGOs which work with the UN human rights mechanisms – do they not realise that this only confirms to us, and to the world, how much oppression and injustice they exercise in their own countries?”

Ce diplomate jordanien continue une longue lettre de dénonciations. Le gouvernement de Birmanie qui persécute les Rohingyas, le gouvernement du Burundi qui lance les Imbonerakure et l’armée contre les civils (dans un rappel évident au génocide Rwanda d’il y a

23 ans, avec ses milices Interahamwe).

Et puis sur RFI ce matin, j’entends que le gouvernement du Zimbabwe se financerait surles diamants de contrebande pour financer les services secrets.

Et puis j’ajouterai, pour bien pourrir la fête, qu’au Cambodge, le pouvoir de Hun Sen ne subit aucun revers judiciaire, ni même diplomatique, alors que l’opposition classique est accusée judiciairement d’une foultitude de délits financiers d’une créativité perverse. Au Vietnam n’existe même pas l’ombre d’une opposition constituée en opposition d’alternance. Passons sur les autres États à parti unique, et négligeons les partis faire-valoir du genre Kuomintang révolutionnaire de Chine populaire. En Afrique noire, la situation est inégale mais l’on signale qu’au Sénégal, au Bénin, au Niger, au burkina Faso, au Ghana, au Nigéria, et j’en passe, le fonctionnement démocratique est somme toute réelle, malgré la pauvreté endémique. Au Togo, dans les deux Congo, au Gabon, des dynasties familiales sont bien enracinées. En Guinée Équatoriale, et au Cameroun, le volet familial est particulièrement fort. En Angola, c’est plutôt le parti qui s’autoperpétue. En Afrique du Sud, l’ANC prend parfois des allures hégémoniques, quoique la possibilité d’une alternance démocratique soit forte. Si l’Afrique du Sud virait à la situation zimbabwéenne, alors la démocratie en Afrique serait peu de chose.

En Asie centrale, l’hégémonisme familialo-partidaire se porte à merveille: Azerbaïdjan, Turkmenistan, Ouzbekistan, Kazakhstan, Tadjikistan, voilà bien des régions où aucun citoyen ne brandit une pancarte antigouvernementale sans la certitude d’une matraque et d’une incarcération. En ThaÏlande l’opposition “rouge” (couleur du parti populiste, et non pas du socialisme-marxiste) est semi-illégale, et à Singapour et en Malaisie prévaut un système hybride aux allures britanniques mais qui assure l’hégémonie d’un seul parti. La répression y est surtout une pression judiciaire sur tout opposant ou critique, et à Singapour l’ambiance y est particulièrement néo-confucéenne — qui peut mieux gouverner que le parti au pouvoir qui a l’expérience?

Le Vénézuéla est au bord de l’autocratie à parti unique, mais le parti chaviste n’a pas tout à fait osé franchir le pas. Hussein de l’ONU le rappelle d’ailleurs dans sa lettre de rentrée. Autrement, l’Amérique latine semble avoir reprit goût au pluralisme politique — unique bonne nouvelle.

Ce qui inquiète peut-être le plus: le sentiment rampant dans les démocraties que la démocratie elle-même est une illusion, et que les autocraties, ou la semi-autocratie de type russe, sont des évolutions naturelles voire souhaitables! Avec elles, point de mariage gay, de déferlante musulmane, d’inféodation aux grands intérêts américains.

La démocratie représentative occidentale otanienne européenne et capitalistique a ses défauts, énormes. Cependant, elle est vivable et amendable. Qui en dit autant au Turkmenistan, au Congo-Brazzaville? Dans le premier on ne dit pas, dans le 2e on lee dit mais alors commence une longue peur personnelle.

Bref Hussein a bien fait de tirer la sonnette d’alarme, d’autant plus que sa commission — dont il ne maîtrise pas les équilibres politiques — a autant servi à fustiger les scories relativement petites des démocraties qu’à démolir les excès odieux des autocraties.

HH

Le djihad salafiste est-il bon pour l’indépendance de la Catalogne?

Les attaques en Catalogne ont propulsé la société catalane sous les projecteurs du monde. Parallèlement au drame terroriste se joue une partie d’échecs entre catalanistes et espagnolistes. Pour le gouvernement autonome catalan, comme pour son pendant national espagnol, juguler le terrorisme, et régler l’avenir constitutionnel de la Catalogne, sont des priorités. Les deux instances convergent. Les morts et blessés sont catalans, espagnols hors Catalogne, italiens, portugais, français, allemands, et tant d’autres. Surtout, le lien entre Catalans et Espagnols hors Catalogne est devenu plus évident. Les deux instances gouvernementales ont fonctionné de concert, avec le volet catalan nettement dans le rôle prioritaire.

Vive les Mossos d’Esquadra

Car le gouvernement catalan a impeccablement mené la répression de la cellule terroriste de Younès Abouyaaqoub. La police autonome catalane, Els Mossos d’Esquadra, a été d’une efficacité remarquée. Réminiscence d’un corps né au 18e siècle, les Mossos sont un genre de gendarmerie sur la totalité du territoire de la Généralité de Catalogne. Depuis le milieu des années 2000, la Guardia Civil et la Policía Nacional n’ont plus de présence. Il y a les Mossos d’Esquadra et les polices urbaines, et rien d’autre. Sauf les services secrets espagnols, le CNI, Centro Nacional de Inteligencia. Plus tard dans le processus, la justice, qui elle reste totalement espagnole nationale et unitaire, prendra le relais. Toujours est-il que les Catalans ont une réputation de sérieux, de modestie, et d’entêtement, et voilà que leur police régionale l’a confirmé. Les Mossos ont abattu les terroristes chaque fois que c’était possible. À Cambrils, un seul Mosso abattit quatre terroristes en quelques secondes.

Mariano Rajoy félicite les institutions catalanes

C’était si impressionnant que le premier ministre espagnol Mariano Rajoy a Tweeté ses félicitations aux Mossos. Mais il ne les commande pas. Et Rajoy ne peut souffrir l’idée d’un référendum sur l’indépendance en Catalogne. Pourtant le référendum, légalement contesté par Rajoy et la justice nationale, est programmé pour le 1er octobre. Le président de la Généralité de Catalogne (ainsi s’appelle l’instance subnationale qui exerce les fonctions subnationales en Catalogne, c’est-à-dire que la Generalitat est le nom du quasi-État catalan) Carles Puigdemont veut ce référendum, et veut la séparation d’avec l’Espagne. Pourtant, tout au long du drame de Catalogne, on pouvait lire des Tweets incessants sur la solidarité de tous les Espagnols pour Barcelone. No Tenim Por, le slogan catalan pour “Nous n’avons pas peur”, serait en train de passer dans le langage de toute l’Espagne. Le roi Felipe VI lui-même à dit que toute l’Espagne est la Catalogne.

Ni le roi, ni le premier ministre espagnol, n’ont omis de se montrer à Barcelone. Puigdemont a eu l’élégance de les y accueillir, et de se tenir à leurs côtés pour les minutes de silence, et pour une réunion formelle de sécurité avec Rajoy. Ce même Puigdemont accorde des interviews à la radio nationale espagnole, en castillan. Il a même critiqué les ultra-nationalistes catalans de vouloir boycotté certaines cérémonies pan-espagnoles.

Des Catalans efficaces, mais assimilés à des Espagnols par le monde extérieur

C’est comme si le djihadisme avait rappelé aux gens les plus raisonnables de Catalogne que pour les terroristes, la Catalogne, l’Espagne, la France, la Belgique, l’Angleterre, l’Allemagne, ne font qu’un. Le mythe des Catalans antimilitaristes, distants des guerres néocoloniales et néo-impérialistes, partisans du dialogue partout, a pris un sérieux coup. La Catalogne est la région ayant accueilli le plus haut pourcentage d’immigrés maghrébins comparé aux autres régions d’Espagne où les Sud-Américains sont plus nombreux. Les djihadistes ont frappé l’Espagne, non pas la Catalogne. Le monde extérieur, des États-Unis à la Chine, place Barcelone en Espagne.

Et les Espagnols raisonnables hors Catalogne ont sans doute réfléchi au fait que les Catalans étaient de dignes compatriotes qu’il fallait flatter un minimum pour éviter le divorce. Les Catalans de tout poil veulent le droit d’avoir un référendum; nombre de Catalans veulent un référendum, que Rajoy le veuille ou non, afin de voter éventuellement contre l’indépendance! La nouveauté actuelle réside dans l’attraction immense que les Espagnols ont démontré à leurs compatriotes de Catalogne. Il y aurait de quoi refroidir quelques ardeurs indépendantistes.